Fyure Dyare

Debout devant mon miroir, je tressais calmement ma natte dans mon dos alors que cette idée m'a assailli.

"Qui suis-je?"

Mes doigts lâchèrent prise, mon oeuvre éphémère perdant substance pour retomber dans les affres de ma crinière. Et je me fixais, je le fixais, j'observais. Mon miroir serti de dorures, mon reflet assombri par une lumière tamisée, mes cernes qui suivaient avec les années, mon regard morne qu'il y a longtemps je me suis mis à porter. Et pourtant, je ne me voyais pas.
Qui étais-je? Corps incomplet à l'âme disparate, dominé par des envies fugaces et creuses?

Bébé à enfant, j'étais envieux et souriant, avide et capricieux,croyant facilement aux autres et à l'esprit peu critique, j'étais si jeune et pourtant, c'est dans cette introspection que je renouais avec la nature honteuse de ma nature. Qui suis-je? Pour ne pas pouvoir faire face à mon innocent passé, ce moment où mes mots dépassaient la pensée?
D'un mouvement lent, je porte mon index courbé à mon œil droit, n'y rencontrant que sécheresse et moi désarroi.

J'ai honte de m'être mis à hurler et rugir tel un sauvage, d'avoir couru dans la brousse, mangé sans distinction, d'avoir ignoré les paroles de mes aînés, d'avoir été un fardeau durant quelques années. Mon éducation propice à la contemplation m'a appris à me calmer mais désormais, je me sens perfide. Je renie, je me brise, je refuse de voir cette enfance qui serait pourtant un plaisir, la nostalgie. Tel un lent poison, les cassiens ont fait de moi quelque chose de différent. Ni draken ni humain, je ne suis qu'un hybride culturel entre deux continents de savoir, incapable de choisir ses sensations entre l'appel de la chair et de l'esprit.. Perdu dans une classe, un enfant parmi d'autres, un draken parmi des humains. Mes frères ont eu la force de s'imposer, de mettre en avant leurs instincts guerriers. Et moi, innocent et lecteur, je goûtais aux prémices de ma corruption, faisant fi de ce qui aurait pu être mes passions.

Qui suis-je? Un contremaître aux mœurs légères et à l'esprit fertile, ni bon ni mauvais, ni associé ni évincé. Je ne suis que le reflet d'années de travail, chacun ayant mis la main à la patte pour tenter de me former et tel un millier de main travaillant sans se concerter, je suis tordu.
Je tressaille et remarque que j'étais figé, arrachant mon esprit à ces sombres pensées. Aussitôt je me remets à tresser, une larme se met à couler et les bonnes vieilles habitudes me permettent encore d'avancer.

D'ici peu ces tremblements vont se calmer, je vais me remettre à marcher, espérant que cette journée va vite se terminer et qu'un jour je vais trouver quelqu'un qui saurait me réparer, avant de me reposer la même question, et ainsi recommencer.

// Tout mes textes seront courts donc j'espère que cela ne vous généra pas. Et oui, j'assume le chaos de ce texte//